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Témoignages de survivants

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Nous étouffons à cause de la fumée dans l’abri, nous n’avons pas d’air

  • Nativ A.'s story

Comme si l'on jouait au gendarme et au voleur ou quelque chose comme ça

À la mémoire de Lotan Avir

23 h, je suis assis avec Zehavi et Ofrili au « Drama » et n’attendons plus que Digmi pour lever nos verres pour mon anniversaire, dans le calme; dans mon esprit, juste un shot et au lit…

Minuit, j’arrive avec Digmi au « Kalabis » pour célébrer le pré-anniversaire d’Adi M. et de là, c’est sûr direct au lit. Mais Adi et Digmi, c’est une combinaison dangereuse, comme on dit chez nous, dans le quartier.

Pendant tout ce temps, je suis en contact avec Lotani par messages au sujet de ma venue au festival NOVA.

Je me sens vraiment fatigué et sans énergie, mais Lotan me dit calmement : " Viens frère, j’ai envie de fêter avec toi ton anniversaire comme il se doit, on va s’amuser tous les deux comme nous seuls savons le faire !! "

Et bien quoi ?

Lotan a réussi à me convaincre en une seconde, je ne peux pas refuser ce grand bonheur et cette folle joie de vivre.

4 h 20, j’envoie à Lotan ma localisation, il arrive en moins de 5 minutes sur la piste "Dark ".

Dès que je l’aperçois, on court l’un vers l’autre comme un couple fou qui ne s’est pas vu depuis une semaine… C’est ainsi que nous célébrions la vie.

Tout le monde autour de nous nous lance des regards, genre " Qu’est-ce qu’ils leur arrivent à s’enlacer comme ça?".

Lorsque nous finissons de nous étreindre et de nous embrasser, Lotan me dit « Allez, Atar, viens dans notre tente, je veux que tu rencontres tous mes amis, ils vont t’adorer, et je veux passer un peu de temps avec toi.".

Nous courons avec enthousiasme jusqu’à la tente de ses amis et il me les présente scrupuleusement un par un sans oublier personne.



Lotam and Nativ

5 h 40 nous retournons, tous les 2 seuls, sur la scène principale et dansons près de la barrière comme et nous nous sourions sans fin.

6 h 15 Lotan et moi retournons sur la piste « Dark », et à mon tour, je le présente à tous mes amis, comme si nous allions nous marier et que chacun de nous présente ses amis à l’autre.

6 h 35 Lotan me dit : " Atar, je vais nous chercher un verre et on se retrouve sur la scène principale. Le soleil commence à se lever, je veux que l’on soit ensemble sur le devant de la scène et que nous profitions de ce moment.".

Alors que Lotan part, la musique s’arrête et je demande à mon ami Marco : « C’est quoi les amplis ici ? C’est quoi cette chute d’amplification ?".

À partir de là, l’évènement ne fait qu’empirer…

6 h 50 on demande à tout le monde, dans les haut-parleurs, d’évacuer et on nous informe que l’événement est terminé.

Au même moment, je me rends compte qu’il y a un tir de roquettes dingue dans notre direction, des roquettes en quantité impressionnante, comme je n’en avais jamais vu de ma vie.

Tout le monde est confus et cherche à se cacher sous la scène et partout où ça serait possible. Au même moment, j’aperçois Newman et Maya passer à côté de notre tente

et je demande à Rotem si elles veulent rentrer avec moi à Tel-Aviv.

Elle me répond en souriant que tout va bien et qu’elles ont une voiture.

Je demande à nouveau, " Tu es sûre?".

Elle répond " Oui bien sûr, on est OK .".

Nous courons vers nos véhicules, mais entre-temps, un embouteillage monstre s’est formé en direction de la route Reim -> Bééri.

Je coupe à travers champ et j’arrive à le contourner et à rejoindre la route

je me rends compte qu’il y a un tir de roquettes dingue dans notre direction, des roquettes en quantité impressionnante, comme je n’en avais jamais vu de ma vie.

Nous commençons à rouler vers le nord ; 100 mètres avant le panneau indiquant le kibboutz Be’eri, je vois des centaines de véhicules faire demi-tour dans une folle hystérie, roulant à contre sens dans notre direction, sur les bas-côtés; certains véhicules se renversent et les gens nous crient « Il y a des terroristes à l’entrée de Be’eri, fuyez !".

« Il y a des terroristes à l’entrée de Be’eri, fuyez !".

Je fais demi-tour rapidement et prudemment et ce faisant je remarque un pick-up blanc avec à l’intérieur, des dizaines de mecs du Hamas, armés de toutes sortes d’armes et qui tirent dans tous les sens.

Je conduis comme un fou aussi vite que possible en direction du sud, je passe l’entrée de la fête et après quelques centaines de mètres, de nouveau le même refrain, les voitures font demi-tour vers nous en hurlant " Il y a des terroristes partout!".

je remarque un pick-up blanc avec à l’intérieur, des dizaines de mecs du Hamas, armés de toutes sortes d’armes et qui tirent dans tous les sens.

Je comprends que nous sommes bloqués de tous les côtés et cernés par les véhicules de personnes qui cherchent à fuir. Je laisse la voiture dans un fossé et cours en direction de la sécurité qui était à la sortie du festival et leur demande " Mais qu’est-ce qu’il se passe bon sang ? Qu’est-ce qu’il faut faire ?".

Les pauvres policiers, impuissants, me répondent : « courez en direction du soleil (vers l’est). Ce fut la dernière fois que je vis mes amis; nombreux ont été retrouvés morts, d’autres, portés disparus, et d’autres, kidnappés par le Hamas.

Tout juste avant que cela n’arrive, je hurle à tout le monde de me suivre, que je connais bien cette zone où j’ai fait mon service militaire.

Je commence à faire sortir les véhicules vers les champs, orientant tout le monde pour les sauver et leur permettre de s’enfuir au plus vite.

C’est là que j’ai perdu mes amis Marco et Rami. J’ai commencé à courir très vite dans les champs et je suis entré dans un égout dans lequel j’ai eu l’impression de rester des heures, mais je réalise que ce ne sont quelques minutes, elles m’ont paru une éternité.

Ce fut la dernière fois que je vis mes amis; nombreux ont été retrouvés morts, d’autres, portés disparus, et d’autres, kidnappés par le Hamas.

À un moment, je décide de sortir de l’égout et de les chercher.

Par chance, je les ai retrouvés sur la même route et ensemble nous courons et montons dans une voiture avec des gens que nous ne connaissions pas, et nous nous sommes entassés avec un autre couple qui était comme nous dans les champs et que nous ne connaissions pas non plus.

C’est là, nous avons repéré les pick-up du Hamas qui fonçaient sur nous, en tirant dans tous les sens, enlevant des corps, comme si l’on jouait au gendarme et au voleur ou quelque chose comme ça

Nous avons commencé à rouler, Ben, le chauffeur, nous a sauvé la vie. Il a pris la route parallèle à celle que nous avions empruntée pour fuir.

À partir de là, nous avons rapidement accéléré, pour fuir vers le sud. Nous avons remarqué, à l’approche du croisement de Netivot et après avoir roulé quelques minutes, qu’il y avait les forces israéliennes qui nous faisaient signe en nous hurlant de faire demi-tour, ils nous ont juste dit qu’il se passait quelque chose au croisement,et nous découvrons des visions d’horreur, là… juste devant nos yeux.

Ben fait un violent demi-tour au milieu de la route de Netivot.

Là, on est descendus au milieu d’un vieux quartier résidentiel de Netivot

Quelqu’un a pensé que nous étions des terroristes et a pointé son arme sur nous; à la dernière seconde nous lui avons crié que nous étions juifs et il a baissé son arme.

C’est là que nous avons réalisé la gravité de la situation. Nous parcourons les rues et nous voyons qu’ici tout le monde porte la kippa et n’est donc pas au courant de la situation, pensant qu’il n’y a eu que des salves de missiles.

Nous courons comme des fous et tirons les gens en dehors des synagogues et nous leur hurlons de dire à tout le monde d’aller se protéger dans les abris parce qu’il y a des terroristes partout dans le sud.

On essaye d’entrer dans les maisons, mais personne ne nous ouvre pensant que nous sommes des terroristes.

On continue à avancer et on remarque une sorte de centre communautaire désaffecté, on essaye de briser la clôture sans succès.

Soudain, on aperçoit une ouverture étroite, on y glisse sans réfléchir à deux fois, et on entre dans une petite pièce qui n’était pas protégée, mais qui avait une sorte de porte blindée, nous avons pensé que ça pourrait nous protéger des coups de feu et des effractions des terroristes.

Nous courons comme des fous et tirons les gens en dehors des synagogues et nous leur hurlons de dire à tout le monde d’aller se protéger dans les abris parce qu’il y a des terroristes partout dans le sud.On essaye d’entrer dans les maisons, mais personne ne nous ouvre pensant que nous sommes des terroristes.

Là, on a vécu pendant 3 heures un cauchemar interminable, sans lumière, en chuchotant à peine, complètement effrayés, tandis que les roquettes tombaient dans la cour extérieure.

J’appelle mon père qui est déjà dans un commissariat du nord et lui explique la gravité de la situation et où nous nous cachons.

À ce moment précis, nous entendons et voyons à travers la fente les escouades du Hamas tirer des coups de feu dans les rues et sur les maisons, sans arrêter un instant pendant des heures et cela à quelques mètres de nous.

Après un certain temps, nous avons compris que les terroristes n’étaient plus dans les environs et qu’il n’y avait plus que des roquettes, nous sortons prendre l’air, et jetant un coup d’œil par la fenêtre arrière du centre,

Je vois un homme religieux qui prie dehors et ne semble pas avoir conscience de ce qu’il se passe.

Nous rassemblons tout notre courage, aucune idée d’où il nous venait, et courons vers lui pour lui expliquer la situation. Il nous emmène dans un abri qui est à 200 m.

Nous courons dans une panique folle vers cet abri, et y restons cachés une heure, jusqu’à ce que les forces militaires de Netivot arrivent pour nous secourir. Nous avons été conduits au centre de contrôle de Netivot. Ça s’est passé à 18 h 30.

Nous arrivons au centre de contrôle, et nous comprenons l’ampleur du désastre.


Nativ A.

In memory of Lotan Abir, may he rest in peace.


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